Biography
Son dernier chemin
Bruno Gröning meurt à Paris le 26 janvier 1959
Diagnostic: cancer de l’estomac à un stade avancé
A la fin de l’automne 1958, Bruno Gröning se rendit à Paris avec sa seconde femme, Josette, qu’il avait épousée en mai 1955, et se fit examiner par le cancérologue et ami Dr Pierre Grobon. Le résultat de plusieurs examens radiographiques montra un cancer de l’estomac à un stade avancé. Le docteur Grobon voulut opérer de suite, mais Bruno Gröning refusa.
Il revint en Allemagne et prépara les fêtes de Noël des communautés. Le 4 décembre, il enregistra sur bande magnétique les paroles qui devaient être écoutées dans les différentes communautés. Ensuite, il retourna à nouveau à Paris avec sa femme. Entretemps, le docteur Grobon avait informé l’éminent spécialiste en chirurgie cancéreuse, le docteur Bellanger. Ce fut dans la clinique de celui-ci, située rue Henner, non loin de Montmartre, que l’opération eut lieu le 8 décembre. Le résultat fut effrayant pour les médecins : c’était encore bien pire que ce que les radiographies avaient laissé supposer - ce n’était plus opérable. La plaie fut refermée aussitôt.
Rétablissement étonnamment rapide
Josette Gröning écrivit à ce sujet : « Ils ne purent cependant pas comprendre que l’aspect extérieur de Bruno trahît si peu ses terribles souffrances intérieures, qu’il pût encore respirer normalement, que son métabolisme fonctionnât encore impeccablement au cours des dernières semaines, que son analyse sanguine fût excellente. Normalement, à ce stade avancé, des vomissements surviennent à la moindre prise de nourriture et le patient, très éprouvé, doit lentement mourir de faim. Chez Bruno, rien de cela ne se manifesta. »
A la surprise de ses médecins, il se rétablit très vite et retourna en Allemagne où il passa les fêtes de Noël. A la mi-janvier 1959, il rencontra, durant trois jours, les dirigeants de la nouvelle association et détermina la façon dont l’œuvre devait être poursuivie. Les deux hommes ne se doutèrent point que c’était leur dernière rencontre avec Bruno Gröning.
Opération à Paris pendant un orage
Le 21 janvier, il prit l’avion pour retourner à Paris. Une opération était devenue indispensable en raison d ́une occlusion intestinale. Le 22 janvier 1959, à 9 heures du matin - à l’heure exacte où la procédure de révision débutait à Munich - Bruno Gröning fut opéré une nouvelle fois. Il dut supporter ce que lui- même avait réussi à épargner à d'innombrables personnes; il ne pouvait ni ne devait s’aider lui-même.
Ce matin-là, alors qu’il se trouvait sous anesthésie, un violent orage s’abattit subitement sur Paris. La femme de Bruno Gröning relata : « Un phénomène naturel étrange se produisit: le 22 janvier 1959, alors que mon mari se trouvait encore sous anesthésie; un orage éclata brusquement sur Paris, assombrissant l’atmosphère sereine et claire de cette journée. Il fit tellement sombre que l’on fut obligé d’allumer la lumière en pleine journée. L’infirmière exprima son étonnement au sujet d’un orage aussi violent. Dans les jours qui suivirent l’opération, la température et le pouls de Bruno furent tout à fait normaux. Il se leva même encore deux fois et prit place dans un fauteuil. »
« Brûlure intérieure totale »
Le 25, il tomba dans le coma et le lendemain, le 26 janvier 1959, à 13 h 46, Bruno Gröning mourut à la clinique Henner d’un cancer, comme l’écrivit le médecin sur l’acte de décès. Etait-ce réellement un cancer ? Le docteur Bellanger avait dit après la seconde opération : « La destruction dans le corps de Bruno est terrible, c’est une combustion intérieure totale. Qu ́il ait pu vivre aussi longtemps et sans endurer des souffrances atroces est un mystère pour moi. »
Bruno Gröning avait déjà dit plusieurs années auparavant : « Lorsqu’on m’interdira d’exercer mon activité, je brûlerai intérieurement. »
Nécrologie
Une lettre du docteur Grobon, adressée le 26 février 1959 à la veuve, témoigne de la façon dont Bruno Gröning assuma son amer destin. « Ceux-ci (les soins prodigués par les médecins à Bruno Gröning) n’étaient que naturels et je dois avouer qu’ils ont trouvé un soutien énorme dans le courage, la volonté et la personnalité remarquable de Bruno Gröning. (...) »
Le docteur Bellanger exprima encore son admiration envers Bruno Gröning, dans une lettre écrite en décembre 1974 : « Bruno Gröning était un homme de cœur, un homme de grande valeur, d’une grande ténacité ; et sa dignité vis-à-vis de la souffrance et de la mort suscite encore aujourd’hui l’admiration. »
Après l’incinération du corps, un verdict définitif n’est plus prononcé
Le corps de Bruno Gröning fut incinéré dans un crématorium à Paris et l’urne enterrée au cimetière de Dillenburg.
Le procès fut déclaré clos en raison de la mort de l’accusé et un verdict définitif ne fut jamais prononcé.
Chacun peut obtenir par lui-même aide et guérison
Le « docteur-miracle de Herford », qui avait apporté le salut à des milliers et des milliers de personnes, mourut seul et abandonné dans une petite ruelle de Paris. Pourquoi devait-il en être ainsi? Pourquoi a-t-il dû porter de si grandes peines? Pourquoi n’a-t- il pas pu s’aider lui-même?
Grete Häusler (1922-2007), qui obtint elle- même des guérisons, qui fut collaboratrice de Bruno Gröning pendant de nombreuses années et fondatrice du « Cercle des Amis de Bruno Gröning », écrit à ce propos dans son livre intitulé Vivre la guérison, cela est vérité : « Bruno Gröning a fait beaucoup de bien durant sa courte présence sur Terre. Le don d’aider et de guérir lui a été donné à la naissance. Partout où il allait, des choses merveilleuses se passaient, inexplicables par la raison. Il fut connu du grand public en 1949. Après les grandes guérisons qui eurent lieu à Herford, alors qu’on parlait de lui dans le pays et à l’étranger, une interdiction de guérir lui fut infligée après trois mois seulement. On le poursuivit, on le traqua, on lui fit un grand procès et on voulut le punir et le condamner. Pourquoi ? A qui a- t-il nui ? A personne, mais il a fait tant de bien à des milliers de personnes; aide qu’elles n’auraient pu obtenir d'aucun être humain. On voulut le punir, lui l’innocent ! Innocent, on lui interdit de faire ce que Dieu lui avait demandé de faire - aider les hommes ! Il dut subir amèrement cette méchanceté. A Paris, dans la clinique cancérologique de la rue Henner, dans de grandes souffrances, il brûla intérieurement par ce même courant guérisseur Heilstrom qu’on lui refusa de transmettre. La loi des hommes voulut le lui interdire en Allemagne. Il se trouva ainsi accusé comme un criminel, au milieu de tous les mensonges et de toutes les calomnies. Seul et en silence - aucun ami ne s’en doutait - il porta jusqu’au bout toute la souffrance de l’humanité. Et c’était un fardeau à porter, mais ce ne fut pas en vain ! Cela devait se passer ainsi, il n ́était plus possible d’aider les hommes autrement. »
Et dans son livre Je vis afin que l’humanité puisse continuer à vivre , elle écrit : « Quant à l’emploi du mot ‚sacrifice‘, nous devrions, nous les hommes, être très vigilants. Ici toutefois, lorsque Bruno Gröning décéda à Paris, ce mot, investi de tout son poids, décrit la vérité. »
C’est seulement ainsi que sa parole put s’accomplir, comme cela est consigné de nos jours dans de nombreux témoignages de réussite : « Quand je ne serai plus sur cette Terre en tant qu’homme, c’est-à-dire quand j’aurai abandonné mon corps, alors l’humanité sera parvenue au point où chacun pourra, par lui-même, recevoir aide et guérison. »
Procédure d’appel et pourvoi en cassation
Position désavantageuse de Gröning
Position désavantageuse de Gröning
Lors de la procédure d’appel, en janvier 1958, Bruno Gröning fut désavantagé par le fait que ce ne fut pas lui mais le ministère public qui fit appel. Ce ne fut pas seulement cette négligence de son avocat d’alors qui lui nuisit, mais aussi la mise à disposition hésitante des documents au nouvel avocat- conseil de Gröning qui gêna la préparation des débats.
Un autre inconvénient fut l’assurance beaucoup plus grande avec laquelle, en comparaison avec la première audience, les témoins à charge se présentèrent. Ils semblaient s’être mis d’accord sur le point de l' « interdiction du médecin ».
Prison et amende avec sursis, « une opprobre » sans que la question des guérisons soit élucidée
Ainsi le verdict fut cette fois : Huit mois de prison pour homicide par négligence et 5000 DM d’amende pour transgression de la loi relative aux praticiens paramédicaux. La sentence fut prononcée avec sursis.
La baronne Anny Ebner von Eschenbach, qui avait assisté aussi bien à la première qu’à la seconde audience, qualifia le jugement de « honte pour l’Allemagne ».
Bruno Gröning expliqua qu’il était puni pour le bien qu’il faisait. Il déplora que, pendant tout le procès, personne ne se fût intéressé de savoir comment une guérison survenait, même pas ses propres avocats. Si on avait approfondi cette question, on aurait constaté que sa manière d’agir n’avait rien de commun avec un traitement médical. Le procès aurait dû être suspendu. Cependant l’éclaircissement de cette question n’intéressait personne au tribunal. On avait une idée préconçue sur Gröning et on n’était pas disposé à en dévier.
Demande de pourvoi en cassation peu avant le décès
Mais ceci non plus ne constitua pas la fin du procès. Cette fois, ce fut Bruno Gröning qui demanda un pourvoi en cassation. La date de l’audience fut fixée au 22 janvier 1959 devant la cour d'appel de Munich. Mais celle-ci ne devait pas avoir lieu car Bruno Gröning mourut dans le même mois.
« Sa parole conjure la maladie »
Les guérisons continuent de se produire malgré les procès et l’interdiction de guérir
Guérison extérieure et transformation intérieure
Pendant ces débats et luttes, l'action de Bruno Gröning continua. Ainsi le journaliste spécialisé en médecine, Dr Horst Mann, écrivit en 1957 dans une série d’articles intitulée « Sa parole conjure la maladie » parue dans la revue Neuen Blatt:
« Le lendemain je me suis rendu de Hamelin à Springe, petite ville au bord de la Deister. Une communauté y avait été fondée. La guérison d’un certain nombre de personnes en était à l’origine. Et là aussi j'ai vécu ce fait, comme auparavant à divers endroits de Schleswig-Holstein, à Augsburg, Hamelin, Vienne, Plochingen et dans d’autres villes : des gens se sont levés et m'ont parlé de leurs maladies. Ils m'ont cité leurs médecins qui les avaient traités. Ils ont raconté leur guérison grâce à Gröning. Et ils étaient toujours prêts à lever la main et à prêter serment.
‘Quand j'étais bébé, on m’avait déjà déboîté les deux hanches’ a raconté la quinquagénaire Julie Prohnert de Hannovre. ‘Plus tard je ne pouvais marcher qu’avec des béquilles. Le médecin ne pouvait que soulager mes douleurs. Quand j’ai écouté une conférence de Monsieur Gröning, j’ai senti une forte réaction. Mon dos, qui était déjà complètement voûté, s’est redressé. J’ai pu marcher à nouveau. Je n’ai pas eu de rechutes...’
'J'avais du rhumatisme articulaire et étais constamment torturé par des éruptions et des abcès. Monsieur Gröning m’en a libéré' a dit Wilhelm Gabbert de Hamelin.
‘Seule la morphine pouvait m’aider à supporter mes troubles biliaires’ a raconté Kurt Severit d’Evestorf. ‘Je remercie Bruno Gröning de m’avoir libéré de ces maux.’
‘J’avais un diabète très prononcé, a rapporté Robert Thies de Springe, mais ce qui était encore plus alarmant, c’était une faiblesse du muscle cardiaque. Ces deux affections ne me font plus souffrir aujourd'hui. J’en remercie Monsieur Gröning.'
On pourrait poursuivre cette liste. Ce sont des gens de tous les âges qui m'ont raconté leurs expériences; hommes, femmes et enfants. Bien des maladies ont été citées, depuis les maux de tête en passant par des inflammations des nerfs, sciatiques, troubles rénaux et biliaires, jusqu’aux affections cardiaques et paralysies.
Mais c’est encore quelque chose d’autre qui m’a profondément touché. Beaucoup ont raconté très ouvertement devant tous les auditeurs qu’ils avaient, grâce à Gröning, vécu une transformation intérieure. La chasse au succès et le comportement égoïste ont fait place à un calme intérieur et à une attitude de solidarité. »
La confiance rend le succès possible pour chacun
Dr Horst Mann écrit encore: « Lors de tous ces entretiens avec des gens qui se sentaient guéris par Bruno Gröning, une question s’est imposée toujours plus à moi. La guérison était-elle possible chez chaque individu - ou encore plus audacieux - pour chaque maladie ? Où étaient les limites de la force qui émanait de Bruno Gröning ? N’y avait-il pas de risques ? (...)
Lors de ma dernière visite, je lui ai posé cette question. ‘Je ne peux ni ne veux forcer personne’ m'a-t-il répondu. ‘Si quelqu’un se ferme et n’est pas disposé à laisser la force de l’ordre s’épanouir intérieurement, alors il me manque à moi aussi la disposition pour intervenir. Alors je conseille seulement à cette personne de faire sauter le verrou du Mal qui entrave la guérison.’
J’avais encore une question : ‘Chaque maladie est différemment dangereuse’ lui ai- je dit. ‘Supposons qu’un malade gravement atteint, condamné par plusieurs médecins, vous fasse demander par un médecin qui lutte encore pour son patient. Est-ce que vous pourrez aider ?'
‘Oui’, a dit Gröning, sans hésitation. ‘Si le malade y croit et que le médecin a confiance en sa voie, le succès ne fera pas défaut. La confiance commune va mobiliser chez le malade des forces insoupçonnées. C’est souvent lorsque le malade désespéré saisit la dernière bouée de sauvetage que le succès arrive le plus vite.’ »
Séparation de l’association Gröning
L’heure est venue de tirer les conséquences du dommage causé
L’étroitesse d’esprit et la bureaucratie provoquent l’inaction quant à l’amende
En octobre 1957, une discussion eut lieu entre Bruno Gröning et le comité de direction de l’association Gröning . Par sa bureaucratie bornée, l’association avait fortement nui à Bruno Gröning. La cause de cette dispute fut la sentence selon laquelle Bruno Gröning aurait dû payer dans un bref délai 2000 DM d’amende. Comme il ne recevait pas d’argent pour son activité et, de ce fait, ne possédait pas les moyens financiers nécessaires, le comité directeur de l’association Gröning avait décidé, dès le début du procès, de subvenir aux dépenses. Mais la prise en charge de l’amende fut controversée au sein du comité directeur. On voulut du reste vérifier par de longues procédures bureaucratiques si l’union était tenue de payer les 2000 DM exigés. Ce serait seulement ensuite qu’on s'occuperait d'obtenir cette somme. Ainsi était-il prévisible que l’argent nécessaire ne parviendrait à Bruno Gröning - si vraiment c’était le cas - que beaucoup trop tard. L’association serait ainsi restée inactive, sachant très bien que Bruno Gröning, dans l’impossibilité de verser l’amende, encourait le risque d’aller en prison. Par ce fait il en résulta un conflit ouvert et finalement une rupture.
Amis de mauvaise foi
Bruno Gröning aborda dans les 62 pages de son bilan des activités de l’association, tous les points sur lesquels elle lui avait nui. En résumé il expliqua : « Si je fais aujourd’hui des comparaisons entre mon entourage antérieur (les affairistes Meckelburg, Enderlin, Schmidt et Hülsmann) et mon entourage actuel (membres du comité directeur de l’association), j’en viens au même résultat final : aujourd’hui s’est finalement produit la même chose qu’en ce temps-là. Aujourd’hui, ceux qui se disent mes plus grands amis, mes amis les plus proches et les meilleurs, n'ont rien fait d’autre que ceux d’autrefois. A cette époque, des acteurs malhonnêtes m’ont trompé. Aujourd’hui, ce sont des amis qui ont failli à leur devoir en restant passifs alors qu’à cause de procès, de condamnations, et parce qu’on refusait de m’aider, parce que je ne pouvais me rendre dans mes communautés faute de voiture, parce qu’on n’a rien entrepris contre la campagne de presse diffamatoire, qu’on a seulement semé la confusion, que tout simplement on n’était pas là quand j’avais besoin de gens qui auraient pu et dû me soutenir par leur savoir et leur place dans la société, il n’a pas pu se réaliser ce pourquoi je suis ici sur cette Terre.
Aucun de ces amis n’a engagé son Moi pour me libérer, aucun n’a eu le courage de prendre vraiment position pour moi. Rien ne s’est passé. D’une façon bureaucratique et mesquine on a pris décision sur décision. Personne ne s’est vraiment engagé pour moi, personne n’a vraiment agi avec tout son être pour me décharger de toutes ces luttes aux procès, contre la presse, pour trouver une aide, pour la voiture qui ne marchait plus, contre la boue et la calomnie, etc., et ne s’est placé devant moi pour me permettre de faire ce pour quoi je suis ici, sur cette Terre: transmettre la force vitale aux hommes et les conduire à la foi.
Que j’aie pour cela besoin de calme, que je ne doive pas sans cesse être dérangé par des influences extérieures de ce monde, que j’aie besoin d’un véritable rempart de protection pour laisser agir librement ce qui m’a été donné, personne n’y a pensé, aucun de mes amis, de ceux qui veulent être mes amis. Et c’est ce qui est honteux et pour moi décevant:
- Les affairistes ont voulu tirer leur profit, ils sont reconnus comme de mauvais hommes.
- des amis de l’association Gröning sont trop mous, trop indifférents, trop paresseux, je ne veux pas dire méchants.
Et le résultat est le même: Je n’ai pas été libéré. Bien des amis du comité directeur de l’association Gröning n’ont pas tenu leurs promesses. On m’a seulement bâillonné par toutes ces mesures. »
L’échec de l’association
Weisser démissionna et l’association Gröning, qui n’avait jamais réussi à obtenir son inscription au registre des associations, fut dissoute peu après. Elle fut remplacée par l' Association pour promouvoir les fondements d’une vie psychique-spirituelle naturelle , fondée en 1958, ses présidents furent Erich Pelz pour l’Allemagne et Alexander Loy pour l’Autriche. Mais cette dernière association créée du vivant de Bruno Gröning ne devait pas, elle non plus, apporter ce qu’il en espérait. Son nom ne fut même pas mentionné dans les statuts.
Le grand procès (1955-1957)
Inculpation pour homicide involontaire et acquittement accompagné d’interdiction définitive de guérir
Le 4 mars 1955 le ministère public accusa à nouveau Bruno Gröning. Une fois de plus on lui reprocha une infraction à la oi relative aux praticiens paramédicaux. On l'accusa en outre d’homicide par négligence dans un autre cas.
Gröning dément l’allégation d’une promesse de guérison et d’interdiction de consulter un médecin
Après avoir reçu l’acte d’accusation, il s’adressa à ses amis : « Mes chers amis! Ces derniers jours, toute la presse et la radio ont propagé une nouvelle plus ou moins tendancieuse à mon égard pour vous informer que le ministère public munichois étayait une accusation pour homicide par négligence contre moi. J’aurais promis, fin 1949, la guérison à une jeune fille de 17 ans atteinte de TBC et l’aurais empêchée de voir un médecin et de se rendre dans un sanatorium. Je serais responsable de la mort de cette jeune personne. Celui qui a entendu ou lu ces nouvelles avec lucidité aura reconnu quel but l'on poursuit : provoquer la confusion chez mes amis et empêcher toutes les personnes en quête d’aide de s'intéresser de plus près à nos efforts et au savoir que je propage. On cherche par tous les moyens à freiner aussi bien mon activité que la vôtre et celle de l’association Gröning. Il est bien évident que les choses sont différentes de ce qu’on présente ! Je n'ai nul besoin de donner des explications à mes amis à ce sujet. Ils savent que je ne fais pas de ’promesses de guérison’ et ne déconseille jamais de consulter un médecin. »
Reprise étrangement tardive de l’enquête
Gröning continue : « J’ai été acquitté en 1952. N’est-il pas étrange que le ‘cas Kuhfuss’, qui s’était passé fin 1949/1950, n’ait pas été examiné déjà pendant le procès de 1951/1952 alors que tous les documents étaient rassemblés ? N’est-il pas frappant que l’instruction pour la nouvelle ouverture d’un procès contre moi ait eu lieu exactement au moment où le public apprenait que le 22 novembre 1953 que l’association Gröning avait été fondée à Murnau! Car depuis janvier 1954, de nombreux guides de communauté, amis et membres de l’association ont été surveillés et interrogés par la police. »
Témoins à décharge non acceptés, témoins à charge bienvenus
La mise en place du procès dura bien au- delà de deux années. La défense de Bruno Gröning fut fortement entravée. Presque tous les témoins à décharge furent refusés, par contre ceux de l’accusation acceptés. Parmi eux se trouvèrent aussi deux anciens collaborateurs de Gröning: Eugen Enderlin et Otto Meckelburg. Particulièrement Meckelburg - coaccusé pendant le premier procès – se dressa en termes acérés contre Gröning. Il employa tous les moyens pour lui nuire. Il joua un rôle déterminant quant à l'accusation pour homicide involontaire. Le cas s'était produit alors qu’il était «manager» de Bruno Gröning.
La manipulation du litige Ruth Kuhfuß
En novembre 1949, l'employé de la Caisse d’Epargne, Emil Kuhfuss, et sa fille Ruth, âgée de 17 ans, souffrant d’une tuberculose pulmonaire bilatérale, étaient venus à une conférence de Bruno Gröning. Gröning avait constaté de suite qu’on ne pouvait plus l’aider et s’était exprimé en ce sens auprès d'un médecin présent. Pourtant Meckelburg l'avait harcelé vivement et exigé qu’il se chargeât du cas. Ainsi une rencontre personnelle entre Bruno Gröning et Ruth Kuhfuss eut lieu après la conférence. Gröning avait encouragé la malade et invité le père à faire faire un examen médical après neuf jours. Il avait voulu obtenir par là que la jeune fille, qui ne voulait plus rien entendre des médecins, fût à nouveau sous contrôle médical. Le père avait assuré s’en charger.
La correspondance échangée durant la période qui suivit fut réglée par Meckelburg et ne parvint pas jusqu’à Bruno Gröning. Il n'entendit à nouveau parler de Ruth Kuhfuss qu'en mai 1950. Dans l’intervalle, son père avait envoyé des requêtes instantes à Gröning, le suppliant de leur rendre visite. Meckelburg n'avait pas transmis les lettres mais organisé de son propre chef - à l'insu de Gröning - une rencontre avec Monsieur Kuhfuss. Il en avait informé Gröning peu avant la date fixée et l'avait forcé à l’accompagner.
Meckelburg prétendit plus tard que Bruno Gröning avait promis à la jeune fille de la guérir. En réalité, c’était lui-même qui avait assuré au père qu’il forcerait Gröning à le faire. Meckelburg avait vu en cet employé de la Caisse d’Epargne une bonne source d’argent dont il avait voulu profiter, mais pour cela il avait besoin de Gröning. Peu après cette visite, Gröning se sépara de Meckelburg.
Un grand reproche que l'on fit à Gröning fut d’avoir interdit à Ruth Kuhfuss de se faire soigner par un médecin. Mais, bien au contraire, il avait lui-même envoyé la jeune fille chez un médecin, ce que même des témoins de l’accusation confirmèrent, dès la première rencontre. Dans une émission radiodiffusée en automne 1949, il avait conseillé aussi aux gens de « faire faire un examen médical de contrôle jusqu’à la fin ». Il conseilleit toujours aux personnes cherchant de l'aide à faire confiance à leurs médecins.
Ruth Kuhfuss, qui avait déjà subi sans succès plusieurs thérapies douloureuses, avait refusé tout traitement supplémentaire. Elle mourut le 30 décembre 1950 des suites de la maladie.
Une expertise médicale confirme l’impossibilité de guérir
Du point de vue médical, le Dr Otto Freihofer s’efforça d’éclairer le cas Kuhfuss. Dans un commentaire d’expertise, il écrit : « En observant les faits objectivement, tout profane doit arriver à la conclusion, comme l’a également formulé l’Office de la Santé de Säckingen, qu’il n'y avait aucun espoir de guérison, selon supputation humaine, vu ‘l’état très grave’ qui, d'après un rapport médical, ‘menaçait la vie’ ou ‘la mettait en péril’. De même, tout médecin honnête, n’ayant pas la prétention de croire que, étant en possession des médicaments les plus récents, il puisse se passer des forces de la nature, devra approuver l’expertise du professeur Lydtin de Munich, selon laquelle ‘on ne peut prétendre qu’avant le 5 novembre 1949 une guérison avait été fortement probable’. A mon avis, il est plus que surprenant que la patiente ait même vécu jusqu’au 30 décembre 1950, de sorte que l’influence de Gröning ait tout de même pu prolonger sa vie. En résumé, j’aimerais clore mon commentaire d’expertise en disant que les affirmations selon lesquelles ‘des chances de guérison aient existé’ et ‘la vie de la patiente Kuhfuss aurait encore pu être prolongée davantage si Monsieur Gröning ne s’était jamais approché d’elle’ ne peuvent être faites avec certitude ni être fondées. »
Jugement malheureux
Fin juillet 1957, une audience eut lieu à la cour d’assises de Munich. Bruno Gröning fut acquitté en ce qui concerne l'homicide par négligence. Il fut condamné à une amende de 2000 DM pour infraction à la loi relative aux praticiens paramédicaux.
Bien que le jugement semblât positif à première vue, ce fut une chose inacceptable à ses yeux. Cela équivalait à une interdiction définitive d’agir. Par la faute de son avocat, qui estima la sentence beaucoup plus positive que Gröning, ce ne fut pas lui qui fit appel mais le ministère public. La seconde audience eut à nouveau lieu à Munich mi- janvier 1958.
L'association Gröning
Espoir de pouvoir agir librement grâce à l’association
Pour pouvoir atteindre un maximum de personnes malgré l'interdiction de guérir Bruno Gröning avait créé des communautés au début des années cinquante. Il y avait tenu des conférences et orienté toute son activité vers la transmission de son savoir à ceux qui sont en quête de secours.
Protection légale et comité de direction renommé
Le 22 novembre 1953, il fonda l' association Gröning à Murnau/Seehausen, cette dernière devant être inscrite au registre des associations, mettant ainsi son action sous protection légale. Des conflits ultérieurs avec la loi relative aux praticiens paramédicaux devaient être ainsi évités définitivement.
Le conseil d'administration de l'association Gröning se composait, entre autres, du comte Zeppelin, du comte Matuschka, de la baronne Anny Ebner d'Eschenbach, de l'architecte en chef Hermann Riedinger et du directeur Constantin Weisser ainsi que de Rudolf Bachmann comme cofondateur, dont l'association se sépara rapidement. Bruno Gröning en fut nommé président à vie.
L’avidité au gain du secrétaire l’emporte sur l’intérêt des malades
Le journaliste et lecteur de Heidelberg, Egon Arthur Schmidt, en fut le secrétaire. A Herford déjà, il s'était tenu aux côtés du « docteur miracle » et avait créé l’ association des amis de Bruno Gröning. Mais celle-ci n'avait pas fonctionné selon les aspirations de Bruno Gröning et avait été très vite dissoute. Gröning s'était séparé de Schmidt car celui- ci avait détourné l'argent des dons.
En 1952, Schmidt s'adressa de nouveau à Bruno Gröning, déclarant avoir reconnu ses torts. Il le pria de lui permettre d'aider à édifier son œuvre et Bruno Gröning le prit comme collaborateur. Ainsi Schmidt eut une occasion supplémentaire de montrer s'il avait à coeur l'intérêt du malade ou seulement celui de son propre portefeuille.
En 1955, Bruno Gröning se sépara définitivement de Schmidt, celui-ci n'ayant pas changé sa façon de penser. Il essayait toujours de tirer profit des capacités de Gröning. Comme Madame Hülsmann auparavant, il entama plusieurs procès contre lui, voulant récupérer après coup les bénéfices de son travail bénévole.
L’association est-elle là pour aider Gröning ou Gröning pour aider l’association?
La direction de l'association fut prise en charge par Constantin Weisser et Hermann Riedinger. De prime abord, cela parut très prometteur car ils étaient des hommes du monde et leurs connaissances pouvaient être profitables à l'œuvre. Mais cela comportait aussi le risque qu'ils agissent à l'encontre de la volonté du simple travailleur dont le niveau de formation ne correspondait pas au leur.
L'évolution alla effectivement dans ce sens au fil du temps et les deux hommes acceptèrent de plus en plus difficilement les propos de Bruno Gröning. Ils semblaient oublier totalement que l'association portait non seulement son nom mais qu'elle existait pour lui. L’association Gröning ne servit finalement plus que leurs propres intérêts. Ils perdirent totalement de vue son objectif qui était de venir en aide aux personnes souffrantes. Ils semblèrent ne pas vouloir admettre que c'était par Bruno Gröning que les guérisons se produisaient et non par l'association.
Ainsi, peu à peu, 'association Gröning se développa à l'opposé de ce qu'elle aurait dû être. Pour l'homme dont elle portait le nom, elle devint une prison qui, au lieu de lui procurer une liberté d'action, le musela de plus en plus.
Le premier procès concernant l’interdiction de guérir (1951-1952)
L’action de Gröning était-elle comparable à l’exercice de la médecine ?
Inculpation pour exercice illégal de la médecine
En 1951/52, Bruno Gröning comparut pour la première fois devant le tribunal de Munich pour exercice illégal de la médecine. Si, en 1949, son activité avait encore été considérée par le ministère de l'Intérieur de Bavière comme pur acte d'amour, elle fut désormais assimilée à un acte thérapeutique au sens médical du terme. L'accusation s'appuya sur la loi concernant les praticiens paramédicaux de 1939 qui supprimait l'ancienne liberté de guérir, celle- ci étant réservée aux médecins nazis.
Ce qui parle pour et ce qui parle contre une atteinte à la loi concernant les praticiens paramédicaux
Bruno Gröning fut acquitté en première et en seconde instances. Le président du Tribunal de Munich déclara dans son verdict en mars 1952:
« Le Tribunal trouverait insensé de condamner l'accusé sur la base d'une expertise unilatérale. Car affirmer que l'activité de Bruno Gröning tombe sous la loi relative aux praticiens paramédicaux est plus que douteux, vu qu'elle se déploie dans un domaine encore trop peu exploré aujourd'hui. »
En appel, l'innocence de Bruno Gröning fut bien confirmée, mais son activité fut clairement définie comme un acte thérapeutique dans le sens de la loi relative aux praticiens paramédicaux :
« L'accusé a exercé ainsi, sans autorisation et sans être médecin, une activité visant la constatation, la guérison ou le soulagement de maladies, de souffrances ou de lésions physiques auprès d'êtres humains, ce qui est considéré être une action médicale au sens de la loi relative aux praticiens paramédicaux. [ ...] »
Une « erreur » excluant la culpabilité signifie une interdiction de guérir
Le prononcé de jugement dit encore : « Une condamnation de l'accusé ne pouvait pourtant pas s'ensuivre car il se trouvait dans l'erreur en ce qui concerne les caractéristiques objectives de faits relevant de l'exercice de la médecine et n'avait donc pas agi de façon préméditée. Cette erreur exclut toute culpabilité. »
L'erreur excluait toute culpabilité de la part de Bruno Gröning et fut élucidée par un jugement du tribunal. L'acquittement qui s’ensuivit équivalait à une interdiction judiciaire de guérir. Dès lors, Bruno Gröning devait savoir que son action était interdite puisque définie comme exercice illégal de la médecine aux termes de la loi. Les vrais tenants et aboutissants de son action, selon lesquels sa façon de procéder n'a rien à voir avec l'acte thérapeutique dans le sens médical du terme, ne furent jamais reconnus.
Escrocs tolérés
Bruno Gröning donne à chacun la chance de se convertir
Argent versé sous la contrainte – les collaborateurs dévoilent leur vraie nature
Sous prétexte de vouloir l'aider, de nombreuses personnes réussirent toujours à approcher Bruno Gröning. Beaucoup ne cherchèrent toutefois qu'à tirer profit de ses compétences. Il semblait les attirer de façon irrésistible. Quand elles n'arrivaient pas à leurs fins ou qu'il s'en séparait, elles essayaient maintes fois, par de longs procès, de l'obliger à payer.
Ainsi, par exemple, Madame Hülsmann qui, en guise de remerciement pour la guérison de son fils, avait, avec son mari, acceuilli Bruno Gröning comme hôte chez elle à Herford. Après s'être rendu compte qu'elle ne pouvait tirer profit de cette situation, elle l'attaqua au tribunal du travail. Elle comptabilisa tout le temps qu'elle lui avait consacré auparavant bénévolement et exigea ultérieurement un salaire. Bruno Gröning dut lui verser une mensualité jusqu'à la fin de ses jours. Ce ne fut pas le seul cas. Bon nombre de ses anciens collaborateurs montrèrent ainsi leur vrai visage.
« Je devais rencontrer aussi ces personnes pour découvrir ce qu’il y avait au fond d’elles-mêmes »
Mais pourquoi Bruno Gröning permettait-il à ces soi-disant collaborateurs de faire partie de son entourage ? Pourquoi ne se débarrassa-t-il pas simplement de ces « esprits mercantiles »? Lors dune conférence, le 31 août 1950 à Munich, il s'expliqua à ce sujet: « Ce que certaines personnes ont essayé jusqu'à ce jour, c'est de gagner de l'argent grâce au savoir et au pouvoir de ce petit homme. Elles ont cru avoir trouvé une mine d'or. Elles ont aussi eu l'occasion de gagner de l'argent, mais n'en ont pas profité, Dieu merci. Je devais rencontrer aussi ces personnes pour découvrir ce qu'il y avait au fond d'elles- mêmes, qu’elles étaient sans scrupules, qu’il leur était indifférent de savoir si les malades obtenaient de l’aide ou non. Il y a des gens sans scrupules qui peuvent voir les malades sans ressentir aucune compassion. Ces personnes-là ne se sont jamais inquiétées d’eux, elles ont tout fait pour s’introduire dans mon entourage. Je sais que la question surgit ici et là: ‘Eh bien, si cet homme a un tel savoir, pourquoi ne savait-il pas cela, peut-être ne sait-il rien ?’ Si je sais quelque chose et dans quelle mesure je le fais, vous le découvrirez progressivement. Mais il devait en être ainsi. Ce matériau manquait à la construction afin de dégager la voie pour vous tous. »
« ...alors chacun sait qui ils sont »
Ayant obtenu elle-même la guérison,Grete Häusler (1922-2007), de nombreuses années collaboratrice de Bruno Gröning et fondatrice du « Cercle des Amis de Bruno Gröning » décrit dans son livre Voici la vérité sur Bruno Gröning les circonstances suivantes : «Une fois, sur le point de prendre congé, je souhaitai tout le bien possible à Monsieur Gröning en lui disant: ‘Monsieur Gröning, je vous souhaite de pouvoir travailler en paix maintenant et de ne plus être attaqué par des collaborateurs malhonnêtes’, et il me rétorqua à mon grand étonnement : ‘pas du tout, il doit en être ainsi !’ A l ́époque, je ne pus le comprendre mais il m'expliqua pourquoi il devait agir ainsi et supporter tout cela. Il me révéla ainsi un grand secret : ‘Je sais ce qu’un l'homme porte en lui. Mais si je disais aux gens : ‘c'est un menteur, c'est un escroc, un voleur’, personne ne me croirait. Comment m'y prendre? Je dois attirer ces gens à moi, leur enseigner le bien, les inciter à la conversion puis leur donner l'occasion de mentir, de tromper et de voler. S'ils le font quand même, alors chacun saura qui ils sont. Alors je les laisse m'approcher et je ne suis pas lâche, je me bats. ’ »
Nouvelles voies et nouvelles impasses
Des hommes d’affaires autour de Gröning
Un manager autoproclamé de Gröning avec des exigences particulières
En guise de remerciement pour la guérison de sa femme, un homme d’affaires de Wangerooge voulut assister Bruno Gröning et lui soumit des plans concrets pour l’édification de maisons de santé. Bruno Gröning accepta et Meckelburg devint son «manager». Fin décembre, tous deux se rendirent à Wangerooge. Gröning y prit la parole lors de manifestations organisées par Meckelburg et d'innombrables guérisons eurent lieu. Il fit totalement confiance à cet homme. Dans une déclaration authentifiée datée du 8 janvier 1950, il remit l'avenir de son œuvre entièrement entre les mains de Meckelburg:
« Monsieur Gröning déclare donner son accord au projet de Monsieur Meckelburg et s'engage à mettre sa personne à la pleine disposition de cette cause, à soutenir Monsieur Meckelburg lors de la fondation prévue de l'association et de chaque activité ultérieure de celle-ci et d’une façon générale à faire tout son possible pour servir la cause de l’association.
Cette obligation lie Monsieur Gröning à Monsieur Meckelburg personnellement ainsi qu'à l'association uture et aux objectifs susmentionnés.
Monsieur Gröning s'engage en outre à n'accorder ce soutien à aucune autre personne ou cercle de personnes. Il n'exercera son activité que dans le cadre de l'association et en accord avec Monsieur Meckelburg. »
Dès janvier, Meckelburg créa l' Association pour la recherche des méthodes de guérison selon Gröning. Il se nomma secrétaire général et s'octroya un salaire mensuel de 1000,- DM. Bruno Gröning ne fut pas rétribué. Il s'avéra que Meckelburg ne tint pas ses promesses. Il n'avait vu en Gröning qu'une source d'argent et le désignait ironiquement comme le « meilleur cheval de son écurie ». Il ne se préoccupait pas des malades. Il avait lié Gröning par ce contrat à sa personne et le « guérisseur miracle » devait faire ce qu'il exigeait de lui.
Gröning ne réussit à se séparer de Meckelburg qu'en juin 1950, ce qui lui valut ces cris de vengeance: « J’anéantirai ce Gröning, je le réduirai en miettes. »
Un guérisseur proposant des conférences
Ensuite Gröning travailla quelques mois avec le praticien munichois Eugen Enderlin. Celui-ci avait obtenu une guérison au Traberhof et lui proposa de faire des conférences dans son cabinet. Mais Enderlin se révéla, lui aussi, être un homme d'affaires. Son intention n'était pas d'aider car il ne pensait qu'à s'enrichir grâce au « phénomène Gröning ». Ils se séparèrent vers la fin de l'année et une nouvelle collaboration en 1952/53 échoua pour les mêmes raisons.
Un praticien carrièriste
Par la suite Gröning fit des conférences dans la pension Weikersheim à Gräfelfing. Le journaliste Dr Kurt Trampler l'accueillit chez lui et organisa les rencontres. Il connaissait Gröning depuis l'automne 1949. A l'époque, il s'était rendu au Traberhof comme correspondant d'un journal munichois et avait obtenu la guérison inespérée d'une jambe. Par gratitude, il écrivit le livre La grande conversionet intervint en faveur de Gröning auprès des autorités. Comme chez Enderlin, il y eut beaucoup d'intéressés aux conférences de Gräfelfing. D'incroyables guérisons y eurent lieu. Mais les rapports avec Trampler se soldèrent aussi par un échec. Un beau jour, celui-ci estima avoir assez appris de Gröning, s'en sépara et se déclara guérisseur indépendant.
Le Traberhof – déferlement des foules à Rosenheim
En septembre 1949, jusqu’à 30 000 personnes en quête d’aide se rassemblent chaque jour devant Gröning
A la fin des examens de Heidelberg, Bruno Gröning se tourna, en août 1949, vers l'Allemagne du Sud. Il voulut fuir le tumulte fait autour de sa personne et se retira dans un domaine privé près de Rosenheim. On réussit tout d'abord à garder son adresse secrète. Toutefois, après que les premiers journaux eurent révélé son arrivée en Bavière, un véritable mouvement de masse commença de plus belle.
Jusqu'à 30.000 personnes affluèrent chaque jour au Traberhof de Rosenheim. La presse, la radio et les actualités hebdomadaires en relatèrent. On tourna même un film ayant pour titre « Gröning », documentant tout ce qui se passait autour de lui.
Scènes bibliques
Le journal Zeitungsblitz écrivit dans une édition spéciale de la deuxième semaine de septembre: « Entre-temps, plus de 10.000 personnes s'étaient rassemblées, ayant attendu depuis des heures sous une chaleur torride le grand moment où Bruno Gröning parut sur le balcon, parla à la foule et fit rayonner sa force curative. Les gens étaient pressés les uns contre les autres pour profiter au maximum de ses ondes curatives. Et déjà les effets se firent sentir chez les malades en chaises et fauteuils roulants ou chez les individus se trouvant à la périphérie. A nouveau des malvoyants recommencèrent à voir, à nouveau des handicapés moteurs se levèrent, à nouveau des paralysés bougèrent leurs membres raidis. Des centaines parlèrent de douleurs accrues aux endroits malades, tiraillements, picotements ou fourmillements, d'un sentiment de ‘légèreté’ indescriptible ou de maux de tête disparaissant soudainement. »
Ces scènes bibliques ne se produisirent pas seulement au Traberhof. Partout où Gröning apparut, il fut aussitôt entouré d'une multitude de malades. Anita Höhne décrit les réactions autour de Gröning dans son livre Guérisseurs aujourd'hui: « A peine Gröning annonçait-il sa venue que des pèlerinages commençaient. C'étaient des scènes typiques que celles décrites par le journaliste Rudolf Spitz lors d'une visite de Gröning en septembre 1949 à Munich:
‚ A 19 h, des milliers se tenaient debout dans la ‘Sonnenstrasse’ (rue du Soleil). A 22 h 30, ils étaient encore là. En cinq ans de guerre, j'ai vécu beaucoup de choses, mais je n'ai jamais été aussi bouleversé que pendant les quatre heures durant lesquelles je fus assis vis-à-vis de Gröning, voyant un horrible défilé de misère et de souffrances. Des épileptiques, des aveugles et des paralysés appuyés sur leurs béquilles se poussèrent vers lui. Des mères tendirent vers Gröning leurs enfants paralysés. Il y eut des évanouissements, des cris, des supplications, des vœux, des prières et des soupirs.‘ »
Les organes d’Etat se montrent favorables
Anita Höhne continue de citer le journaliste Rudolf Spitz : « Des malades sur civières, des paralysés, une foule immense fut aussi observée par un autre journaliste munichois, Dr Kurt Trampler, au Traberhof à Rosenheim où Gröning vivait alors. Trampler vint en tant que reporter de l’hebdomadaire Münchner Allgemeine - un journaliste rigoureux qui ne rapportait que ce qu'il avait vu et entendu lui-même : 'Nous entendons maintenant depuis le balcon une voix qui n'est pas celle de Gröning et nous nous précipitons à la fenêtre. Le préfet de police de Munich, Pitzer, s'adresse à la foule. Il relate qu'une sciatique qui l' handicapait depuis des années s'est améliorée en présence de Gröning. Pitzer n'est vraiment pas homme à avoir un penchant pour la sensibilité excessive, mais il peut témoigner de ce qu'il a observé sur lui-même. Maintenant il prend officiellement parti pour Gröning et le député CSU Hagen suit son exemple avec une déclaration semblable. ‘ »
L’ administration bavaroise fut également favorable à Bruno Gröning. Le journal Münchner Merkur rapporta le 7 septembre 1949 sous le titre « Bienveillance envers Gröning » : « Le ministre-président Dr Ehard a déclaré lundi lors d'une conférence de presse que l'action d'une ‘personnalité exceptionnelle’ comme Bruno Gröning ne devait pas être entravée par les paragraphes. D'après lui, l'autorisation pour Gröning de guérir en Bavière ne devrait pas se heurter à de grandes difficultés. »
Le ministère de l’intérieur bavarois fait savoir en fin d'édition : « la vérification provisoire de l'activité guérisseuse de Bruno Gröning a montré qu'elle peut être considérée comme un simple acte d'amour et qu’elle ne nécessite pas l'autorisation prévue par la loi réglementant l’activité des guérisseurs. »
Après la calomnie, passage à la documentation médicale des guérisons
Au Traberhof un grand tumulte fut fait autour de Gröning. Beaucoup de profiteurs apparurent qui voulurent tirer profit de ses capacités. Ils nuisirent à son nom et à sa réputation et amenèrent les autorités à se désolidariser. Quand la situation devint insoutenable, Gröning se retira dans les montagnes bavaroises. Il voulut donner suite à quelques offres pour l'édification de maisons de santé. Son but fut de créer des établissements où les personnes cherchant de l'aide obtiendraient la guérison dans des conditions précises. Des médecins devaient faire des contrôles préalables et postérieurs, selon l'exemple de Heidelberg, et documenter les guérisons survenues.
Le « phénomène Gröning » et la science
Vérification par la médecine et promesse de rapport d’expertise
A l’ époque de Herford, es experts en matière médicale du magazine Revue commencèrent à vérifier les guérisons faites par Gröning. Le psychologue et médecin de Marburg, le professeur Dr. H. G. Fischer, se rendit à Herford avec une équipe d'envoyés spéciaux. Il eut des entretiens avec des personnes guéries et dut constater avec étonnement que la « méthode » de Gröning était effectivement couronnée de succès. Sur ce, la Revue s'engagea à éclaircir scientifiquement le « phénomène Gröning ». La « méthode de guérison » du « docteur miracle » devait être étudiée au centre hospitalo-universitaire de Heidelberg.
Bruno Gröning donna suite aux propositions de Fischer parce qu'il lui promit un rapport d'expertise positif dans le cas d'un déroulement favorable. Gröning espérait avoir trouvé ainsi une voie pour exercer librement.
Guérisons en présence des médecins – « Bruno Gröning n’est pas un charlatan »
Le 27 juillet, les examens commencèrent. Les personnes sur lesquelles il dut prouver ses capacités furent choisies parmi les 80.000 demandes d'aide écrites qui lui avaient été adressées. Y furent ajoutés quelques malades de la clinique Ludolf-Krehl de Heidelberg. Toutes furent consciencieusement examinées au préalable et des diagnostics précis furent établis. Ensuite elles se rendirent auprès de Gröning qui laissa agir sur elles « sa méthode », toujours en présence de médecins. Ils furent témoins de quelques guérisons spontanées. Les examens de contrôle postérieurs faits à la clinique confirmèrent les guérisons. Même des maladies incurables comme celle de Bechterew furent guéries.
Dans un rapport d'expertise préliminaire paru dans la Revue, le professeur Fischer expliqua expressément que Bruno Gröning n'était pas un charlatan mais un médecin de l'âme doté d'un don naturel. Ainsi il essaya d'expliquer le « phénomène Gröning » tel qu'il le comprit sans toutefois lui rendre justice.
Gröning refuse toute manigance
Le rapport définitif devait paraître après l'analyse de tous les résultats. On assura à Bruno Gröning que la voie serait définitivement libre pour son activité future. Entre-temps les professeurs Fischer et von Weizsäcker (qui fut à la tête de toute l'entreprise) firent à Bruno Gröning la proposition suivante : ils voulaient créer des maisons de santé dans lesquelles il pourrait agir aux côtés des médecins. Ils s'en réservaient toutefois la direction et le choix des malades.
Bruno Gröning dit à ce sujet : « Les conditions financières posées par le professeur F. étaient conçues de telle façon qu'elles étaient inacceptables pour moi. Bien sûr il y eut bien des entretiens à ce sujet, également avec des messieurs qui voulurent financer cette œuvre. Je n'ai pas pu me montrer d'accord avec ces propositions et les ai refusées pour les raisons suivantes : 1. je ne possédais pas un sou et ne pouvais de ce fait prendre d’ engagements financiers que je n'aurais pas pu tenir; 2. je n'avais jamais pensé à faire un commerce de ce projet. De ce fait, tout ceci était pour moi une exigence impossible. En outre, je ne voulais que faire ce que ma vocation me permettait: aider les personnes en quête d'aide et me mettre à la disposition des médecins et psychothérapeutes, mais jamais en faire un commerce. »
La non-remise du rapport d’expertise et le conflit naissant avec la législation
Les professeurs finirent de s’intéresser à Bruno Gröning suite à son attitude de refus. Le rapport d'expertise promis ne fut jamais établi. Au lieu de lui donner la possibilité d'exercer librement, on lui mit toujours plus les bâtons dans les roues. Au cours des examens, sa « manière de guérir » fut commentée avec des expressions comme «traitement », « patient », etc. et qualifiée d'activité médicale. De ce fait, un conflit avec la loi réglementant l’activité des guérisseurs fut inévitable.
1949 – au centre de l’actualité
L’action de Bruno Gröning à Herford
Des milliers de malades et de personnes en quête d’aide «assiègent» Gröning
Dieter Hülsmann, âgé de neuf ans, était déjà alité depuis longtemps. Il souffrait de dystrophie musculaire progressive et personne parmi les médecins et professeurs consultés n'avait pu l'aider. Après que Bruno Gröning se fut occupé de lui, l'enfant put à nouveau marcher. L'ingénieur Hülsmann, vivement impressionné par la guérison de son fils, pria son hôte de rester. Il voulut inviter d'autres malades afin que « l'homme miracle » – comme l’appelait Hülsmann – les aidât.
Bruno Gröning accepta et le nombre de personnes en quête de guérison augmenta de jour en jour. Toujours plus de gens eurent connaissance des événements surprenants relatifs à Gröning. En peu de temps, son nom fut dans toutes les bouches. Les journaux parlèrent du « docteur miracle » et, dans la zone britannique, il fit la nouvelle du jour. Des milliers affluèrent sur la place Wilhelm et des foules s’amassèrent autour de la maison.
Manfred Lütgenhorst du journal Münchner Merkur écrivit entre autres le 24 juin 1949 : «Quand j'arrivai à 10 h 30 du matin à Herford, jusqu'à 1000 personnes se trouvaient devant la petite maison à deux étages de la place Wilhelm. C'était une image indescriptible de détresse. Paralysés en chaises roulantes ou portés par leurs proches, aveugles, sourds-muets, mères avec enfants idiots et paralysés, petites vieilles et jeunes hommes se bousculaient et gémissaient, innombrables. Presque cent voitures, camions et bus stationnaient sur la place Wilhelm et tous venaient de très loin. »
Paralysies, ulcères à l’estomac, cécité: « Monsieur Gröning m’a regardée et maintenant je suis complètement guérie. »
Manfred Lütgenhorst écrit encore: « ‘Croyez-vous que vous serez guéris ?’ demandai-je aux malades. Ils firent oui de la tête. L'un me répondit: ‘Vous auriez dû être là hier; Monsieur Gröning était à Viersen en Rhénanie et ici, dans la cour, cinq paralysés se sont levés et sont repartis guéris chez eux. Guérison à distance - la cour les a guéris.’ Les autres malades le confirmèrent.
Je continuai à circuler parmi la foule et sténographiai les récits miraculeux. A eux seuls ils suffiraient à remplir un livre. Alors que je m'allumai une cigarette, un jeune homme à mes côtés me dit : ‘s'il vous plaît, vendez-m'en une ! ’ Il portait une capote militaire et semblait être un rapatrié de Russie. Je lui donnai la cigarette. Il l'alluma et dit, exubérant: ‘Vous voyez, je peux à nouveau tout faire moi-même.’ En même temps il bougea son bras droit ainsi que les doigts et sa jambe droite. Je lui demandai: ‘Vous avez aussi été guéri par Gröning ? - Oui, en Russie j'ai été paralysé du côté droit. Monsieur Gröning m'a regardé et maintenant je suis totalement guéri; je n’arrive pas encore à y croire.’ Heureux, il remua ses membres.
Je me dirigeai vers un groupe rassemblé autour d’une femme aux cheveux blancs d’environ quarante ans. Je l’entendis dire: ‘Bien sûr, j’ai aussi été guérie par Monsieur Gröning. J’avais de gros ulcères à l’estomac, maigrissais toujours plus et ne pouvais plus dormir à cause des douleurs. Nous étions douze personnes chez Gröning [...] Il m’a regardée et j’ai eu le sentiment que les ulcères tombaient comme une pierre sur le sol. Depuis je n’ai plus de douleurs, reprends du poids et les radiographies que j’ai fait faire ont incontestablement montré la disparition des ulcères. Je me suis mise à la disposition de la commission d’enquête médicale. Je peux vous dire qu’ils étaient bien étonnés !’
La femme poursuivit: ‘Mais ce n’est rien; la semaine dernière un aveugle se tenait ici dans la cour. Il a attendu plusieurs jours et plusieurs nuits. Comme je viens souvent ici je l’ai remarqué. Il me faisait pitié et je l’ai invité à manger. ‘Non, me répondit-il, je ne dois pas manquer l’instant où Monsieur Gröning sortira.’ Alors je lui ai apporté des petits pains et lui ai dit que je ferais le nécessaire pour qu’il soit conduit à la gare ‘. Je n’aurai besoin de personne, car je pourrai aller seul à la gare’. Et je l’ai vu de mes propres yeux. Monsieur Gröning est venu et le jeune homme s’est écrié : ‘Je peux voir !’ Effectivement, le voile devant ses yeux s’était dissipé. Il m’a décrit le sac que j’avais à la main. Il a dit: ‘Là-bas circule une voiture et j’en vois le numéro.’ et il s’est rendu tout seul à la gare. Tous ceux qui l’entouraient, pleuraient de joie. »
L’administration et le corps médical prononcent une interdiction de guérir
Au bout de très peu de temps, les autorités - avant tout celles de la santé - s'occupèrent du cas. Une commission d'enquête fut constituée et on interdit à Bruno Gröning d'exercer. Quelques médecins influents furent ses ennemis jurés. Ils mirent tout en œuvre pour mettre un terme à son action et exigèrent qu'il se soumît à un contrôle scientifique de ses facultés de guérir. Les déclarations suivantes faites par les médecins y concourant soulignent clairement leur disposition d'esprit émergeant derrière cette interdiction: « Gröning peut prouver ce qu'il veut, on ne lui donnera tout de même pas l'autorisation de guérir ». « Cela transgresse l'honorabilité professionnelle des médecins que de s'engager avec Gröning ». Fin juin, il dut quitter définitivement Herford. Tous les efforts pour obtenir une autorisation de guérir avaient échoué.
Chemin parcouru et étapes déterminantes de sa vie
Préparation à son action à venir
Années d’apprentissage imposées et interrompues
A la fin de l’école primaire, Bruno Gröning fréquenta une école de commerce. Mais il dut interrompre sa formation après deux ans et demi à la demande pressante de son père. Le contremaître en maçonnerie voulut que son fils apprît également un métier du bâtiment. Il apprit donc celui de charpentier mais ne parvint pas non plus au terme de sa formation. Les troubles économiques de l’après-guerre l’en empêchèrent. A trois mois de la fin de son apprentissage, la société où il était dut fermer pour manque de commandes. Par la suite il vécut des activités les plus diverses. Egon Arthur Schmidt écrit sur cette période :
« Il réussissait tous les travaux qu’il entreprenait »
« Divers collègues de travail me racontèrent qu’il avait la particularité de réussir tous les travaux qu’il entreprenait, qu’il réparât des montres, des appareils de radio ou qu’il travaillât comme serrurier. Il était particulièrement doué pour les choses techniques. Il n’avait jamais hésité non plus à faire les travaux les plus durs et les plus épuisants physiquement. Comme docker il avait tiré la corde comme n’importe lequel de ses compagnons. Il n’en faisait pas un mystère car ceci faisait partie du chemin qui le faisait passer dans les vallées profondes avant de lui faire atteindre les sommets. Un vieux proverbe chinois dit: 'Qui n’a jamais traversé les bas-fonds ne deviendra jamais un saint.' Il y a suffisamment de témoignages de ses anciens compagnons dont l’un me parvint récemment et dans lequel la personne qui avait travaillé un an avec Bruno Gröning dit simplement et sans réserves qu’elle en garde un bon souvenir et qu’il était le meilleur et le plus honnête camarade qu’elle ait connu. »
Mariage et destin familial
l se maria à vingt et un ans, mais sa femme ne fut nullement compréhensive. Elle voulut le confiner dans l’étroitesse d’une vie de famille bourgeoise et considéra les guérisons comme une « marotte ». Les deux fils Harald et Günter nés en 1931 et 1939 moururent tous deux à l’âge de neuf ans. Bien que d’innombrables personnes eussent déjà trouvé la guérison grâce à Bruno Gröning, Gertrude Gröning ne crut pas à la force curative de son mari. Ce ne fut pas à lui qu’elle confia les enfants mais aux médecins. Mais la médecine traditionnelle ne put rien faire. Les deux garçons moururent à l’hôpital, Harald en 1940 à Dantzig, Günter en 1949 à Dillenburg. Pour Bruno Gröning ce furent de lourdes épreuves. Encore des années plus tard, les larmes lui venaient quand il parlait de ses fils.
Ainsi la période entre les deux guerres fut pour lui une préparation à son activité future. Il dut faire mainte expérience amère pour pouvoir comprendre les gens dans n’importe quelle situation et ressentir leur détresse.
Aider au lieu de faire feu – sur le front et en captivité
Pendant la deuxième guerre mondiale il fut incorporé en 1943 dans la Wehrmacht. Il y eut des frictions avec ses supérieurs. Comme il refusait de tirer sur des hommes, on le menaça de tribunal de guerre. Finalement il dut quand même aller au front. Il fut blessé, fait prisonnier par les Russes et expatrié en 1945 en Allemagne de l’Ouest.
Le comportement de Bruno Gröning pendant la guerre était dicté par son désir d’aider. Même au front, il profita de chaque occasion pour s’investir pour ses camarades ou la population civile.
Dans un village russe, il rendit possible l’accès aux réserves alimentaires de l’armée pour les civils menacés de famine. En captivité, il lutta pour obtenir de meilleurs habits, cantonnements et nourriture pour ses camarades. Il en aida beaucoup à guérir d’œdèmes dus à la malnutrition. Dans les horreurs de la guerre, il n’a tué personne mais aidé d’innombrables personnes.
Séparation du couple et sollicitude envers autrui
Il fut libéré en décembre 1945, organisa sa nouvelle vie à Dillenburg dans la Hesse et y fit venir sa famille. Cependant, après le décès de son second fils et devant la volonté de sa femme de lui interdire toute activité caritative, il se sépara de celle-ci. Il se sentait obligé de faire profiter tous les hommes des forces guérisseuses dont il disposait. Il disait : « Je n’appartiens pas à quelqu’un en particulier, j’appartiens à l’humanité. »
Début 1949, son chemin le conduisit dans la région de la Ruhr. Grâce aux récits de quelques personnes guéries, de plus en plus de gens devinrent attentifs à la personne de Bruno Gröning. Il se rendait d’une maison à l’autre, toujours là où on avait besoin de lui, où des malades demandaient son aide. Il agit de cette façon dans un périmètre restreint jusqu’au moment où, en mars 1949, il reçut l’invitation d’un ingénieur de Herford à rendre visite à son fils.
Enfance et jeunesse
Battu, raillé, incompris, accepté – un enfant pas comme les autres
Il fuyait son entourage au cœur dur pour se réfugier dans la nature: « Ici, je fais l’expérience de Dieu »
Bruno Gröning naquit le 30 mai 1906 à Dantzig-Oliva comme quatrième des sept enfants du couple August et Margarethe Gröning. Ses parents constatèrent très tôt qu’il avait quelque chose d’exceptionnel. Ainsi des animaux craintifs comme des lapins ou des chevreuils venaient à lui et se laissaient caresser.
Plus Bruno Gröning grandissait, plus son milieu lui paraissait étranger. Gröning racontait qu’il avait été parfois roué de coups à la maison. Les coups ne faisaient pas souffrir son corps, disait-il, mais il se sentait incompris.
Repoussé par la dureté de cœur de son entourage, le petit Bruno se réfugiait dans la nature. Il se sentait plus attiré par les animaux, arbres et arbustes que par certains hommes. Souvent il disparaissait pendant des heures dans le bois voisin.
« Là je percevais Dieu dans chaque arbuste, dans chaque arbre, dans chaque animal, oui même dans les pierres. Je pouvais rester partout durant des heures –je n’avais d’ailleurs plus la notion du temps– et méditer, et toujours j’avais le sentiment que toute ma vie intérieure s’étendait jusqu’à l’infini. »
Il ne participait jamais aux rudes bagarres des jeunes de son âge. C’est ainsi qu’il était souvent l’objet de moqueries méchantes, puni et battu pour être différent des autres.
Guérisons appréciées de gens et d’animaux
Avec le temps on commença à percevoir en lui l’aspect de sa nature qui lui valut plus tard sa grande célébrité. En sa présence les hommes et les animaux recouvraient la santé. Particulièrement pendant la première guerre mondiale il se rendait souvent dans les hôpitaux militaires où il était toujours le bienvenu. Les blessés se sentaient bien en sa présence et beaucoup guérissaient. Les malades faisaient quérir sa mère, la priant de bien vouloir venir en compagnie du petit Bruno. Dans la famille et l’entourage, on accepta volontiers la faculté qu’avait le jeune garçon de guérir.
Aspiration à l’indépendance
Bruno Gröning écrivit dans sa biographie: « Quand j’étais encore un tout jeune enfant, des malades furent délivrés de leurs maux en ma présence et aussi bien les enfants que les adultes énervés lors de disputes s’apaisaient après quelques mots de ma part. J’ai pu aussi constater comme enfant que des animaux, habituellement considérés comme craintifs ou qu’on disait méchants, se montraient doux et dociles envers moi. Mes rapports avec ma famille étaient de ce fait singuliers et tendus. Très vite, j’aspirai à une totale indépendance pour pouvoir quitter ce milieu familial où je me sentais incompris. »
Bruno Gröning (1906-1959)
Un homme hors du commun controversé dans la société
En 1949, le nom de Bruno Gröning se trouva du jour au lendemain à la une de tous les journaux allemands. Médias, radio et actualités parlèrent de lui. Pendant des mois les événements concernant le « Docteur Miracle », comme on l’appelait, passionnèrent la jeune république. On tourna un film, on réunit des commissions de recherche scientifique, et l’administration, jusqu’aux plus hautes instances, s’intéressa à ce cas. Le Ministre des Affaires Sociales de Rhénanie du Nord- Westphalie le fit poursuivre pour infraction à la loi réglementant l’activité des praticiens de santé. Par contre, le Ministre Président de Bavière déclara que personne n’avait le droit de vouer à l’échec les activités d’une personnalité aussi exceptionnelle que Bruno Gröning par des décrets. Le Ministère de l’Intérieur bavarois qualifiait l’action de Gröning d’« œuvre désintéressée de charité ».
Dans toutes les couches sociales, on discutait ferme pour ou contre Bruno Gröning. Des vagues d’émotion déferlaient. Ecclésiastiques, médecins, juristes, hommes politiques et psychologues, tous parlaient de Bruno Gröning. Ses guérisons miraculeuses se trouvaient être une grâce venant du ciel pour les uns et pour les autres, du charlatanisme. Cependant, les examens médicaux prouvaient la réalité des guérisons.
Intérêt dans le monde entier pour un simple travailleur
Bruno Gröning est né à Dantzig en 1906. Expatrié à la fin de la guerre, il émigra en Allemagne de l’Ouest. Il était simple ouvrier. Pour pouvoir vivre, il avait exercé les métiers les plus divers. Il avait été charpentier, ouvrier d’usine et docker. Et brusquement, il se trouva au centre de l’intérêt général. Les nouvelles de ses guérisons miraculeuses firent le tour du monde. Malades, lettres de sollicitations et requêtes arrivèrent de tous les pays. Des milliers de personnes cherchant secours partirent en pèlerinage sur les lieux de son action. Une révolution dans la médecine s’annonçait.
Pris dans l’étau des interdictions, des procès et des collaborateurs âpres au gain
C’était sans compter avec les forces opposées. Elles mirent tout en œuvre pour contrecarrer son action. Un décret d’interdiction de guérir l’empêcha d’agir, on lui intenta des procès. Tous ses efforts pour structurer son activité échouèrent, d’une part à cause de l’opposition de forces sociales déterminantes, d’autre part du fait de l’avidité ou de l’incompétence de ses collaborateurs. Lorsque Bruno Gröning mourut à Paris en 1959, son procès se trouvait dans sa phase culminante. On arrêta la procédure et un jugement définitif ne fut jamais prononcé. Cependant, bon nombre de questions restèrent sans réponse.